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Projet de loi sur le renseignement : l’occasion manquée

L’Assemblée nationale se prononcera demain mercredi 24 juin sur le projet de loi relatif au renseignement. Je ne pourrai malheureusement pas prendre part à ce scrutin, me trouvant toute la semaine en mission à l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe et devant intervenir en séance sur les droits de l’homme à Strasbourg précisément à l’heure du vote à Paris. Ce vote n’étant pas un vote solennel à la différence de la première lecture, je ne peux, en vertu du règlement de l’Assemblée nationale, donner pouvoir à un collègue pour qu’il/elle s’exprime en mon nom. Je le regrette. En première lecture le 5 mai dernier, je m’étais abstenu, expliquant sur mon site  (lire ici)  le pourquoi de ce choix. J’espérais alors que l’examen du texte par le Sénat dans le cadre de la navette parlementaire permettrait de préciser certaines des missions des services de renseignement que je jugeais trop vaguement définies et de donner également davantage de pouvoirs à la Commission nationale de contrôle des techniques du renseignement (CNCTR). Le résultat de ces débats sénatoriaux n’a pas été à la hauteur de mes espérances et je ne peux de ce fait soutenir le projet de loi en cette fin de procédure.

Un développement plus récent m’a consterné : l’adoption par la Commission mixte paritaire, après les débats à l’Assemblée et au Sénat, d’un amendement inédit permettant la surveillance des étrangers de passage en France sans contrôle de la CNCTR. Je trouvais déjà les pouvoirs et moyens de contrôle de la CNCTR trop restreints, voilà maintenant qu’une catégorie de personnes y échapperait totalement. Il m’est difficile de comprendre une pareille mesure, qui malmène le principe constitutionnel d’égalité sur notre territoire et m’apparaît aussi en rupture avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Député d’outre-frontière, l’étranger est ma vie depuis des décennies. L’idée même qu’une personne, parce qu’elle ne posséderait pas la nationalité française, puisse être singularisée et voir ses droits moins protégés dans notre pays me choque profondément. Pour cette raison, si j’avais pu être présent demain à l’Assemblée nationale, c’est en conscience contre le projet de loi que je me serais prononcé, avec le sentiment d’une occasion manquée pour les droits fondamentaux et le nécessaire encadrement des activités de renseignement.

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