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Le temps du sursaut (1): l’échec de Sarkozy

En cet automne 2009, à mi-parcours de son mandat élyséen, Nicolas Sarkozy traverse une singulière mauvaise passe. Elle prend la forme d’une pratique détestable du pouvoir, qu’incarne la volonté assumée de recentralisation du pays via l’étranglement orchestré des pouvoirs locaux. Suppression de la taxe professionnelle, polémique sur la supposée explosion fiscale dans les collectivités locales dirigées par la gauche et réforme territoriale visant ni plus ni moins à tuer les contre-pouvoirs locaux pour mettre le pays à la botte du Président. S’y ajoute le népotisme insupportable qu’aura révélé l’affaire de l’EPAD, à propos de laquelle, autre révélateur signe des temps, les parlementaires UMP, tétanisés par les retours entendus en circonscription, ne seront pourtant pas parvenus des semaines durant à faire entendre au Président la voie du bon sens. Remontée marquée de la délinquance, bilan international creux, échec consommé à Bruxelles avec le soutien insensé à Tony Blair pour la Présidence du Conseil Européen, la mauvaise passe est bien plus qu’un trou d’air : c’est un clair constat d’échec.

L’échec est encore plus flagrant en matière économique et c’est d’abord ici que les socialistes doivent en priorité porter la bataille politique, car la faillite du pouvoir vient sanctionner les choix idéologiques lourds de l’été 2007. Nicolas Sarkozy mène une politique de l’offre, favorisant l’investissement et la réduction du coût du travail, et délaissant à dessein la consommation. Or la demande intérieure est plus que jamais la clé de la reprise économique, a fortiori dans un contexte de redémarrage des pays émergents non accompagné par une croissance du commerce international, comme c’est le cas actuellement. Il est clair que la stagnation des salaires, la hausse du chômage et le faible crédit à la consommation constituent autant de handicaps rédhibitoires pour la relance, sans cependant que ceci ne conduise le pouvoir à dévier d’un iota de la politique de son électorat.

La France s’enfonce dans les déficits et l’endettement. Les déficits publics atteignent 8,5% du PIB. L’endettement ne représente désormais pas loin d’une année de PIB (91% de celui-ci), véritable bombe à retardement dans une perspective de remontée des taux d’intérêt. A de tels niveaux de dérive des finances publiques, c’est l’avenir même du pays et de ses générations futures que l’on hypothèque. Le cœur-même de cette menace, c’est le bouclier fiscal, érigé en tables de la loi par Nicolas Sarkozy, tout à la fois symbole et caricature de la politique de la droite depuis 2007. L’impôt total est plafonné à 50% du revenu, CSG et CRDS comprises. En l’état des finances publiques et des besoins de la France, cette mesure n’est plus tenable. Certains parlementaires de la majorité le savent. Il s’est d’ailleurs fallu de pas grand-chose pour qu’un amendement du Nouveau Centre sortant les prélèvements sociaux et les impôts locaux du bouclier fiscal soit adopté à l’Assemblée Nationale en octobre dernier. Le Président avait sonné le tocsin et sommé Xavier Bertrand de filer toute séance tenante à l’Assemblée Nationale rappeler les fondamentaux sarkozystes aux quelques alliés centristes se piquant  d’émancipation politique.

Nicolas Sarkozy est de fait le seul leader européen sans aucune stratégie de sortie de crise. Le projet de loi de finance pour 2010 en est la meilleure preuve. Ramener le déficit budgétaire à 5% en 2011 grâce à une croissance projetée de 2,5% et à la limitation de la progression des dépenses publiques à 1% en volume est non seulement irréaliste en l’état, mais plus que tout critiquable au regard de l’urgence sociale. La politique que traduisent ces choix budgétaires ne fera qu’accroître les inégalités, la précarité et le chômage de masse partout en France. Quoi qu’en pense le Président, il faudra augmenter les impôts. Les choix faits en ce sens seront progressistes ou non. Une augmentation de 2 points de TVA ne le serait pas, disons-le clairement. Le bouclier fiscal doit donc être levé. Les niches fiscales de 2007, comme la déduction des intérêts d’emprunts immobiliers, doivent être supprimées. La progressivité de l’impôt doit être rétablie pour les revenus élevés. Imaginer un taux de 60% pour les revenus de plus d’un million d’Euros n’aurait rien de choquant au regard de l’effort de solidarité nationale nécessaire.

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