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L’Allemagne et les enlèvements “légaux” d’enfants

Nicolas Sarkozy est allé à Berlin ce lundi pour voir Angela Merkel. Ils auront certainement parlé de l’Euro. A raison. Auront-ils aussi parlé de droit de la famille et, pour être plus précis encore, d’enlèvements « légaux » d’enfants ? Non et pourtant ils devraient, car il existe entre l’Allemagne et la France, comme plus largement entre l’Allemagne et nombre d’Etats européens, un très douloureux contentieux en la matière.

Sur les quelques 50 000 mariages franco-allemands par an, un tiers en effet s’achèvent par un divorce et des décisions de justice sur la garde des enfants du couple. En Allemagne intervient le Jugendamt (service à la jeunesse, dépendant du Ministère de l’Intérieur), dont l’action revient ni plus ni moins à défendre les intérêts du seul parent allemand. Jusque parfois à justifier l’enlèvement d’enfants contre une décision initiale de garde avec la bénédiction a posteriori de la justice au nom d’une avantageuse jurisprudence relative à « l’intérêt supérieur de l’enfant », comme je la décrivais sur ce blog le 12 juillet 2010.

Mais l’on peut aussi détenir un droit parental dûment accordé par le juge allemand et le perdre en quelques jours seulement si le Jugendamt passe à l’action, le plus souvent sans aucune raison majeure, sur la seule base d’un soupçon alimenté par le parent allemand. Et c’est ainsi qu’une mère ou un père d’une autre nationalité qu’allemande, dans un total déni de droit, se retrouve écarté sans le moindre ménagement de la vie de ses enfants, qu’il ou elle ne verra plus au mieux qu’à l’occasion de visites surveillées, dans les locaux d’un tribunal, avec l’interdiction expresse de leur parler une autre langue que l’allemand ! C’est l’enlèvement « légal » d’enfants. Ce sont par milliers que de tels drames se comptent, qui conduisent à de terribles souffrances et ruinent des vies. Il y a des parents qui se battent, dans la solitude et le plus total désespoir, pour revoir leurs enfants dont ils sont séparés et n’ont plus de nouvelles depuis des années.

Cette situation est une honte à un an seulement du cinquantième anniversaire du Traité de l’Elysée. S’il est possible d’incriminer l’insuffisant développement du droit européen de la famille, il faut avant toute chose dénoncer l’intransigeance allemande et regretter aussi que toutes les négociations engagées à ce stade entre chancelleries n’aient conduit à aucun progrès que ce soit. Les voies d’appel contre les décisions de la justice allemande retirant le droit parental sous influence du Jugendamt sont en outre limitées. Rien dans la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 pas plus que dans le Règlement communautaire n°2201/2003 ne permet de légitimer que toutes les décisions aillent systématiquement à l’encontre du parent non-allemand et causent de tels drames humains. Il est intolérable que ce contentieux récurent n’ait trouvé à ce jour aucune solution.

Sa résolution doit être une priorité politique. C’est un devoir. A la fois pour le gouvernement français et les parlementaires concernés, à commencer par le député de la 7ème circonscription des Français de l’étranger, dont fait partie l’Allemagne. Je prends ici l’engagement, si je suis ce député-là à compter de juin prochain, d’y consacrer toute mon énergie. Avec le souci absolu du résultat. C’est une question d’humanité et une exigence de justice.

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