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Mois : mai 2023

Because it’s May

C’est un petit texte que j’écris dans un hôtel de Chaumont. Il est tard en ce dimanche de la Pentecôte. Hier matin encore, nous ne savions pas que nous viendrions dans la Haute-Marne. Tout est né d’un voyage à Paris le week-end passé. Sur la liste des nombreuses visites souhaitées par mes enfants aux quatre coins de la capitale, il y avait les Invalides. C’est grand, les Invalides. Nous y avons passé des heures, courant d’une salle à l’autre, d’un couloir vers un autre, d’une époque à une autre. Ils avaient envie de voir Napoléon, mais ce qui les a le plus impressionné fut au fond l’historial Charles de Gaulle, avec les images d’époque, les films et les voix. Ils ne s’y attendaient pas. Où trouver de Gaulle fut immanquablement pour moi la question subsidiaire, comme pour prolonger notre itinérance historique et familiale. Pas aux Invalides, mais à Colombey, dus-je expliquer, un petit village quelque part dans le Grand Est. De retour de Paris, la semaine passa avec cette idée récurrente : et si on allait à Colombey ? Ce n’est pas si loin de la Belgique, finalement. Et le week-end de la Pentecôte dure 3 jours. Voilà comment, à la dernière minute, s’improvisa ce voyage dans la Haute-Marne. Demain, à la première heure, nous prendrons la direction de la Boisserie et de Colombey-les-Deux-Eglises pour un rendez-vous avec l’histoire glorieuse de notre pays.

Pour arriver jusque Chaumont, nous avons roulé un peu plus de 4 heures, traversant la Lorraine du nord vers le sud. Il faisait beau, les paysages étaient magnifiques comme peut l’être la campagne au mois de mai. Au fond de la voiture pourtant, l’attention se portait plutôt vers un film, La Carapate, précieusement déroulé sur un lecteur de DVD, une autre ode au mois de mai, en moins bucolique et certainement plus comique. Le plus drôle, c’est que de Gaulle est dans ce film aussi, pas le Général libérateur de la France, mais le Président un peu perdu de mai 1968. Ce DVD a une histoire, je l’avais acheté durant le confinement du printemps 2020, pour distraire mes enfants et faire rire, parce qu’il le fallait bien alors. A l’affiche de La Carapate, il y a Pierre Richard et Victor Lanoux. C’est l’aventure totalement loufoque d’un taulard un peu facho en fuite avec son avocat gauchiste, mi-victime, mi-complice, soucieux de lui éviter la peine capitale en obtenant la grâce du Général de Gaulle. De Lyon vers Paris en passant par Auxerre, le tandem traverse la France en grève, dans les campagnes fleuries du mois de mai, piquant la Rolls d’un couple de bourgeois friqués en route vers la Suisse pour y planquer leurs sous et leurs lingots. Le film s’achève par la grâce obtenue par Pierre Richard du Général dans les toilettes de l’héliport de Villacoublay.

Je me suis amusé à entendre mes enfants glousser sur la banquette arrière, rire de mai et rire en mai. Quelque part, le mois de mai, c’est un mois léger, heureux, plein d’espérance. L’hiver est fini, le printemps avance et l’été est bientôt à venir. Les beaux jours sont là. Il y a de l’optimisme dans l’air et ce par-delà les générations. J’aime les paysages et l’esprit rebelle de mai. Notre histoire s’est souvent écrite en mai. J’adore la nature et les couleurs de mai, porté sans doute par les souvenirs de ma jeunesse, quand tout semblait possible, heureux et juste. Il y avait dans mes mois de mai bretons l’odeur du printemps et la force des rêves d’après, les émotions naissantes et les amours qui viendraient. Je revois la campagne finistérienne irradiée par les premiers soleils, le bruit délicat des ruisseaux, le parfum doux des fleurs et des foins. Je me souviens de cette envie de s’allonger dans les champs, de profiter, de rire, d’imaginer et de vivre, d’embrasser joyeusement la vie. C’est le joli mois de mai. La Carapate n’est pas un immense film, loin s’en faut même, mais il donne le moral. Il a aussi à son générique une drôle de chanson, légère et entrainante, depuis longtemps oubliée et qui pourtant restitue tellement toutes ces facettes du mois de mai, frondeur, malicieux, heureux et romantique. Interprétée par les Sunset Brothers, elle nous dit notamment ceci :

It’s May,

Flowers are growing, girl’s knees are showing,

Their hair is flowing all over,

Cause it’s May,

Get high on honey, throw away money,

And don’t ever sail away.

Vers la chanson : https://www.youtube.com/watch?v=5ZPI_v4Cy9E

Demain, à Colombey, l’histoire nous saisira, la plus belle, la plus grande, la plus noble. Tout autour de nous, l’air, les couleurs et l’esprit de mai nous rappelleront combien aussi cette saison est belle, et notamment parce qu’elle porte en elle la force de l’espérance et une vraie part de bonheur.

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Demandons à l’Europe un accueil digne des migrants

C’est aujourd’hui le 9 mai, Journée de l’Europe. Pourquoi le 9 mai ? Parce qu’il y a 73 ans le 9 mai 1950, Robert Schuman, Ministre des Affaires étrangères français, prononçait à Paris une déclaration, inspirée par Jean Monnet, proposant la création d’une communauté européenne du charbon et de l’acier. Cette déclaration est considérée comme le premier texte fondateur de la construction européenne et le 9 mai est célébré depuis 1985 comme la Journée de l’Europe. A Bruxelles, on aime l’appeler, non sans malice, la Saint-Schuman. C’est un jour heureux, un jour de pause et de célébration, un jour d’espoir et de réflexion aussi. J’aime profondément le 9 mai. Il est pour moi comme une fête. Oui, l’Europe est la grande cause, la belle et noble aventure humaniste embrassée par des générations de femmes et d’hommes, par des familles politiques différentes, rassemblées autour du même attachement au développement de la paix par le droit. N’en déplaise aux extrémistes, à ceux qui voient la tête de la Vierge entre les étoiles du drapeau européen ou qui professent depuis des lustres un nationalisme rance et belliqueux, la cause de l’Europe est plus que jamais actuelle. Aucun Etat seul ne pourra répondre aux défis du XXIème siècle. Rassemblée, l’Europe le pourra.

L’Europe, c’est nous tous, citoyennes et citoyens. En fin d’année passée, je me suis joint à un petit groupe de personnes issues de 7 pays pour faire émerger une initiative citoyenne européenne sur le respect de la dignité des migrants. L’idée est née à Rennes, à l’initiative d’un groupe d’élèves du Collège Rosa Parks. Elle a été portée dans un débat participatif organisé par le « Labo Europe » de la ville de Rennes et soutenue très majoritairement par un vote en ligne en 2022. C’est quoi, une initiative citoyenne européenne ? C’est un droit d’initiative politique reconnu à un million au moins de citoyens de l’Union, issus d’au moins 7 Etats membres. Quelle en est la finalité ? Convaincre la Commission européenne de présenter une proposition législative sur le sujet couvert par l’initiative. Il fallait, pour lancer le projet, constituer un groupe composé d’au moins 7 citoyens résidant dans au moins 7 Etats différents de l’Union. Vivant en Belgique, je suis l’un de ces 7 citoyens. Les 6 autres résident en France, en Espagne, en Pologne, en Grèce, en Italie et en Allemagne. Nous formons le comité d’organisation de l’initiative citoyenne rennaise. Notre initiative a été enregistrée par la Commission européenne et nous avons désormais jusqu’au 14 avril 2024 pour aller chercher le million de signatures.

C’est une formidable mobilisation qu’il nous faut impulser à travers toute l’Europe dans les mois qui viennent pour mener notre initiative à bon port. Que recherchons-nous? A obtenir la présentation par la Commission européenne d’un nouveau mécanisme de répartition des demandeurs d’asile dans l’Union européenne, assis sur la solidarité effective entre les Etats membres et en rupture avec le Règlement de Dublin, dont les limites et les injustices sont connues. Nous souhaitons aussi que soient rendues contraignantes des normes communes d’accueil en matière de santé, de logement, d’éducation et de travail assurant aux demandeurs d’asile des conditions de vie dignes dans toute l’Union. Notre initiative repose sur l’application de la Charte des droits fondamentaux de l’Union aux procédures et aux demandeurs d’asile. Elle est fondée sur le respect de la dignité humaine. C’est cela que notre initiative citoyenne porte et qu’il nous appartient de faire partager pour récolter les signatures nécessaires sur le site dédié de la Commission européenne : https://europa.eu/citizens-initiative/select-language?destination=/initiatives/details/2023/000002. Le site de l’initiative citoyenne rennaise est : www.dignity-in-europe.com.

En ce 9 mai, il faut vouloir rêver, penser et agir pour l’Europe. Rien n’est impossible, personne ne saurait ignorer un appel citoyen. Une société civile européenne existe et c’est elle qu’il faut toucher. Des initiatives citoyennes européennes ont abouti au cours des années passées, par exemple sur le droit à l’eau ou l’interdiction du glyphosate, conduisant la Commission européenne à proposer une évolution législative, plaçant le Parlement européen et les Etats membres de l’Union européenne devant leurs responsabilités de co-législateurs, responsabilités qu’ils ont assumées. C’est précisément l’objectif que l’initiative citoyenne européenne rennaise poursuit. Sans doute lui sera-t-il objecté que le sujet est beaucoup trop sérieux – comprendre : citoyens, ce n’est pas pour vous, passez votre chemin – pour épargner aux chancelleries et capitales nationales de devoir en plus se préoccuper de mobilisation européenne. C’est pourtant ce que le Traité de Lisbonne, reprenant une disposition initiale du projet de Constitution européenne, permet avec la reconnaissance des initiatives citoyennes européennes. Elles ne sont pas un gadget, mais un instrument précieux de démocratie participative qui met les citoyens au cœur du projet européen et en fait des acteurs dont la voix doit être entendue.

C’est pour ces raisons que j’ai répondu « oui » lorsque la proposition m’a été faite de rejoindre le groupe organisateur de l’initiative citoyenne européenne de Rennes. Et aussi parce que la cause défendue me touchait particulièrement. Je me souviens de mes missions parlementaires sur la route des Balkans et dans la « jungle » de Calais. Je me souviens du regard vide et perdus des enfants qui couraient après moi dans un camp de réfugiés en Macédoine. Mes propres enfants avaient leur âge. Ce souvenir me poursuit encore, des années après. Les droits fondamentaux sont inconditionnels. Le droit d’asile ne se galvaude pas, il se respecte et il s’honore. L’Europe doit être juste, à la hauteur de ses valeurs et de ses engagements, de ce qui la distingue au sein du concert des nations. Relisons le premier article de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne : « la dignité humaine est inviolable. Elle doit être respectée et protégée ». Le droit d’asile apparaît à l’article 18 et impose à l’Union de respecter la convention de Genève de 1951 sur les réfugiés. L’Europe est un supplément d’âme. C’est dans l’action qu’elle se construit, par la preuve, et justement. En ce 9 mai 2023, soutenons l’initiative citoyenne européenne pour la dignité des migrants ! Le 14 avril 2024, ce million de signatures, nous l’aurons !

Avec plusieurs membres du comité d’organisation autour de Nathalie Appéré, la maire de Rennes, venue présenter l’initiative citoyenne européenne à Bruxelles le 3 mai 2023
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